La chorale des maîtres-bouchers de Louise Erdrich (Le Livre de Poche)

Louise Erdrich écrit des horreurs.
Louise Erdrich possède un immense talent.
Celui de poétiser la viande, le sang, la guerre, la mort, les hommes, la vie.
Ces œuvres pour la jeunesse ne laissaient pas de place au doute : on tenait un auteur d’une certaine trempe. Celle des très grands. Ce livre-ci confirme, renforce, écrase.
L’histoire de Fidelis Waldvogel, boucher fils de boucher allemand, rescapé du charnier de 14-18, partit pour l’Amérique, coure sur une vingtaine d’années. Et ne s’essouffle jamais.
Louise Erdrich alterne scènes oniriques (le ventre de la colline, les vols dans les nuages) et tragédies
(l’agonie d’une jeune femme, une maison transformée en porcherie dont la cave recèle une horreur encore plus grande) avec une maîtrise qui laisse rêveur.
Dans cette fresque d’une belle ampleur, le rapport à la nature et aux esprits est intiment lié à l’histoire. Les morts ne disparaissent jamais tout à fait. Ils nous accompagnent et nous surprennent parfois à travers le regard d’un chien fidèle, dans le chaos de la guerre, sur le bord d’une rivière. Sous les traits d’une chiffonnière hautaine que l’âge transforme en reine.
Il est bien sûr question de bouchers. On cuisine beaucoup dans ce livre, on charcute, on pétrit, on malaxe. Et l’on chante, vous l’aurez deviné. Les hommes, uniquement les hommes, qui chantent pour oublier leur impuissance, l’envoyer vers le ciel. « J’ai loupé Dieu, songea-t-elle. Pourtant, je ne me suis pas raconté d’histoires. Je continue à croire que Dieu est un butor alcoolique qui n’a plus pensé au monde depuis qu’Il l’a créé. Autrefois un génie, oui, je le lui accorde, mais un artiste d’une insouciance suprême qui expédie en enfer Ses tableaux et Ses sculptures les plus extraordinaires. Ses œuvres vivantes les plus exquises, et laisse le diable chier dessus. »

Lu dans le cadre d’un partenariat avec Blog-o-Book

Comments

[Natacha]

J'admire ta force de lecture. Je dirais même quelle lectrice omnivore et infatiguable. Merci de partarager tes découvertes. Faut que tu te gardes des cookies (et pas que les miettes) pour garder le shcwartz de la lecture.
Bizzz